Ce 27 octobre, devant l'Assemblée nationale, plusieurs syndicats étudiants ont dévoilé les résultats d'une enquête sur la santé mentale des étudiants et internes de médecine. Le constat est alarmant : 67% des jeunes et futurs médecins seraient en état de burn-out.
« La crise sanitaire a mis en lumière l’enjeu de la santé mentale des jeunes et futurs médecins. Elle est devenue un intérêt de santé publique, car ce sont les soignants de demain qui feront notre système de santé. À chaque fois que l’un d’entre eux tombe, des centaines de patients en pâtissent tandis que leurs proches et leur famille vivent une souffrance immense », indique le rapport publié par l'Intersyndicale nationale des internes (ISNI), en partenariat avec l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG), l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf) et l'association Jeunes médecins. Les résultats de ces travaux ont également été approuvés par la Conférence des doyens de médecine.
La précédente étude, réalisée en 2017, attestait déjà d'une détérioration de l'état mental des étudiants. 62% des répondants présentaient déjà des symptômes anxieux, 27,7% avaient des symptômes dépressifs et près d'un quart (23,4%) exprimaient des idées suicidaires. En l'espace de quatre ans, cet état de santé s'est considérablement fragilisé.
La charge de travail
Deux tiers des externes et internes rapportent des signes de burn-out. Une proportion qui descend à 39% pour les étudiants de premier cycle. Plusieurs témoignages corroborent cet état de fait, tels que celui de cette étudiante de deuxième cycle qui a dû consulter son généraliste «plus d’une dizaine de fois après un mois d’idées noires et de pleurs constants toute la journée et l’impossibilité de réviser. J’ai été mise sous antidépresseurs pour une durée minimum de six mois jusqu’au concours», précise-t-elle.
Beaucoup de difficultés sont associées à cet affaiblissement: difficultés financières, humiliations professionnels, harcèlements, agressions sexuelles... L'un des autres symptômes reste le temps de travail. Un interne travaille en moyenne 50 heures par semaine et 20 heures pour un externe. «Les gardes de 24 heures, voire plus, sont épuisantes et nuisent clairement et objectivement à notre santé psychique, mais aussi physique d’autant que les moyens techniques donnés pour assurer notre travail sont vraiment indignes », détaille un interne. En comparaison, être en couple permettrait de se protéger en partie de ces risques psychosociaux.
Un quart des étudiants évoque des situations de harcèlement
L'un des éléments inédits, observé dans cette enquête, est la place que le harcèlement a prise dans le quotidien des futurs médecins. Un quart (25%) évoque des situations de harcèlement, 23% parlent d'humiliations et 4% rapportent des agressions sexuelles. 14% signalent aussi de telles situations lors de soirées étudiantes. En dehors de cela, la majorité des problèmes de harcèlement ont lieu au sein des hôpitaux. De plus, ces violences sont souvent réalisées par des supérieurs hiérarchiques. D'après l'enquête, 60% des agresseurs sont des médecins diplômés et 13% sont des internes. Malgré la mise en place d'outils de signalement, seulement 0,6% des victimes les utilisent et 18% n'évoqueront jamais ces situations.
Les syndicats étudiants demandent donc la mise en place de réelles sanctions contre les agresseurs. Ils veulent ainsi en finir avec «la dichotomie de l’étudiant fragile versus l’étudiant fort». L'état actuelle refléterait donc un manque d'investissement de la part du gouvernement. Pour les étudiants répondants, «ce ne sont pas les étudiants ou les internes qui sont fragiles : c’est le système qui les fragilise. Si des violences de toute sorte peuvent être infligées sans que le ou les responsables ne se sentent menacés, quels que soient les dispositifs en place, ces violences continueront».
L'enquête
Cette nouvelle édition de l'étude a été réalisée entre mai et juin 2021, via un questionnaire adréssé aux étudiants et internes de médecine. Au total, 11 754 réponses ont été analysées.